lundi 21 janvier 2008

Canada : La mise sur le marché du Suboxone est-elle une panacée?

L’épopée de la mise sur la mise sur le marché canadien du médicament de la buprénorphine haut dosage, destinée à traiter la dépendance aux opioïdes aura été longue et sinueuse.
Rappelons-nous en effet qu’après près de trois ans d’évaluation, la mise sur le marché du Subutex, un médicament pourtant prescrit à quelque 100 000 français dépendants des opioïdes, a purement et simplement été abandonnée, et ce en raison du fait que compte tenu des risques de diversion de cette médication, Santé Canada exigeait que les patients se rendent tous les jours à la pharmacie pour que celle-ci leur soit administrée sous le contrôle d’un professionnels de la santé.
Aujourd’hui, la buprénorphine est disponible au Canada sous la forme de Suboxone (buprénorphine et naloxone) et la plupart des groupes de patients et acteurs de santé qui, depuis plusieurs années, tentent de faire valoir la nécessité de bénéficier d’autres options thérapeutiques que la méthadone pour traiter un problème de santé aussi complexe que la dépendance aux opioïdes, applaudissent des deux mains.
Or, la mise sur le marché du Suboxone est-elle une panacée? Je n’en suis pas si persuadé.
En effet, nos collègues français, qui eux disposent depuis plus de dix ans du Subutex, doivent se prononcer sur la pertinence de la mise sur le marché de cette nouvelle médication. Il semble que les experts en la matière soient plus que réservés sur la question. Le Suboxone est un médicament coûteux dont l’avantage théorique est de réduire le détournement vers l’injection, malheureusement trop souvent constaté avec le Subutex. Or, plusieurs articles tendent à démontrer, que la présence de naloxone dans le Suboxone rend effectivement l’expérience d’injection de la médication plus désagréable, mais ne conduit pas les utilisateurs à y renoncer.
Au Canada, il est donc fort probable que sur le plan clinique, la mise sur le marché du Suboxone présentera peu ou pas d’avantages par rapport à ceux qu’aurait pu présenter la mise sur le marché du Subutex.

Il est par ailleurs à peu près certain que la méthadone demeurera la médication de référence en matière de traitement de la dépendance aux opioïdes, mais que celle-ci ne peut constituer une réponse optimale pour tous.

Nous ne pouvons donc pas nous passer d’une alternative thérapeutique aussi prometteuse que la buprénorphine. Aussi, je juge essentiel d’appuyer ouvertement la mise sur le marché du Suboxone ainsi que son remboursement par le Régime général d’assurance-médicaments. Rétrospectivement, une question s'impose toutefois! N’aurions-nous pas dû nous montrer plus insistants dans l’appui que nous avons apporté à la mise sur le marché du Subutex, et ce afin que Santé Canada accepte de mettre cette médication sur le marché dans des conditions cliniquement acceptables, ce qui ne fut pas le cas. Il est en effet probable que sur le plan collectif, la mise sur le marché du Subutex aurait été nettement plus avantageuse sur le plan financier et que les risques reliés à son détournement auraient été, à peu de chose près, équivalents.